Préserver l’eau, les océans, et nourrir les Français
Interview de Lionel COLIN, Directeur QHSE et RSE, groupe AQUALANDE
Alors que la Conférence des nations unies sur l’Océan (UNOC) s’est tenue en juin 2025 et que l’Année de la Mer se poursuit en France, quelles pratiques peuvent mettre en œuvre les entreprises pour protéger les océans et préserver les ressources en eau, tout en se développant ?

Illustration avec Lionel Colin, Directeur QHSE* et RSE** du groupe Aqualande, entreprise accompagnée par SG Entrepreneurs. Fondée en 1981 par des pisciculteurs du Sud-Ouest de la France, cette structure coopérative a développé une filière complète, de la sélection à la transformation, du poisson. Leader sur le marché français de la truite fumée avec la gamme Ovive, le groupe emploie plus de 1 000 collaborateurs.
Favoriser la sécurité alimentaire avec un produit local de qualité
« Notre ambition est d’offrir au plus grand nombre l’accès à un poisson local de qualité, à un prix abordable, dans le respect de l'équilibre naturel », affirme Lionel Colin. « Nos interlocuteurs – grande distribution, consommateurs, etc. – portent un intérêt croissant aux questions environnementales et sociales.
Les Français plébiscitent la truite en alternative au saumon et se tournent davantage vers une origine France. En réponse à ces tendances, nos actions sont reconnues : nos piscicultures sont certifiées Agri Confiance et nous sommes labellisés Engagé RSE, niveau exemplaire, par Afnor Certification depuis 2017. Il s’agit de pérenniser notre activité au service de l’économie régionale ».
Proposer une alternative à la surpêche
« La France connait un déficit d’approvisionnement en poissons. La santé des océans s’est dégradée, les ressources halieutiques*** sont au plus bas. Si nous voulons continuer à manger du poisson dans de bonnes conditions, l'aquaculture constitue une solution face à la surpêche.
Pour réduire notre impact sur les océans, nous avons adapté l’alimentation de nos animaux. Désormais, nous nourrissons nos poissons avec 75 % de végétaux. Pour les 25 % restant, nous utilisons des farines et huiles produites avec les restes de poissons des ateliers de transformation, en évitant le croisement d’espèces ».
Améliorer la qualité de l’eau tout en s’adaptant au changement climatique
« Face à la montée des températures de l’eau, paramètre sensible pour nos truites, nous adaptons nos élevages. Quand c’est possible, nous équipons nos bassins de panneaux photovoltaïques qui protègent les animaux de la chaleur, tout en produisant de l’électricité avec moins d’eau.
La truite est très sensible à la qualité de l’eau, nous faisons donc tout pour la préserver. Nous recirculons l’eau : sous réserve de sa qualité, nous la récupérons pour la réutiliser en amont du système. Nous ajoutons de l’oxygène et vaccinons les alevins pour éviter le développement de maladies. Sans oublier un procédé innovant, la bioremédiation qui permet de régénérer la qualité des milieux : des plantes captent l’azote et le phosphore rejetés par les poissons pour produire des végétaux, comme des salades. Nous souhaitons déployer plus largement cette solution ».
Le groupe Aqualande et SG
« Pour continuer de nous développer, nous avons besoins de financer nos projets. C’est tout l’objet du partenariat avec SG », explique Lionel Colin. « Nous évoquons ensemble la prise en compte des enjeux environnementaux et sociétaux. Echanger sur la RSE avec son banquier, c’est un mouvement de fond récent qui s’accroît et va perdurer. Chacun des acteurs de l’économie doit jouer son rôle pour répondre à ces défis ».
Chiffres clés et faits marquants
La consommation de poissons, entre dépendance et surpêche
- 35,5 % des stocks halieutiques*** sont surexploités, contre 10 % dans les années 1970, un chiffre qui ne cesse d'augmenter (source : Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, 2025 - en anglais uniquement)
- 33,7 kilogrammes, c’est la quantité de poissons et crustacés consommés chaque année par habitant en France (source : FranceAgriMer, 2024****)
- 60 % des poissons et crustacés consommés en France proviennent de la pêche (source : FranceAgriMer, 2024****)
Recirculation et bioremédiation : les avantages
- Un système de recirculation d’eau permet d’utiliser beaucoup moins d’eau que la pisciculture classique (source : Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, 2022 - A guide to recirculation aquaculture - en anglais uniquement)
- La bioremédiation consiste à utiliser des organismes vivants (plantes, champignons…) pour dépolluer un environnement contaminé. Il s’agit d’une technologie peu invasive, économique et frugale en énergie.
* QHSE : Qualité, hygiène, sécurité, environnement
** RSE : Responsabilité sociétale des entreprises
*** Les ressources halieutiques désignent l’ensemble des espèces vivantes aquatiques péchées en milieu naturel ou issus de l’aquaculture
**** Etablissement national des produits de l’agriculture et de la mer